11/10/2014
Dans le jardin d'Honorine Burlin
Dans le jardin d'Honorine Burlin
Dans le jardin d'Honorine Burlin, il y a des veaux des vaches et des moutons. Il y a un coq, une oie, un paon, un dindon. Il y a des chevaux, un pingouin, un lion. Il y a un perroquet sur son perchoir et un singe pénard qui déguste sa banane. Il y a plein d'animaux dans le jardin d'Honorine Burlin. Il y a aussi des gens. Des gens du coin, des gens d'ici : le paysan qui laboure son champs, celui qui mène ses boeufs et l'autre sur sa charrette, le jardinier avec sa brouette et la fermière avec son bâton. Il y a aussi des gens connus, des gens vus à la télévision qui ont inspirés Honorine dans ses créations. Avec l'aide de Julien, on peut retrouver Nicolas le jardinier, Fernandel et sa célèbre vache Marguerite, Pierre Perret en facteur derrière un toréador. Peut-être aussi Bourvil avec une bouteille à la main et Mireille Mathieu dans la chanteuse devant l'orchestre qui accompagne ce défilé hétéroclite.
Honorine, née en 1932 a quitté son petit monde enchanté il y a 4 ans maintenant, en 2010. Julien son mari en est devenu le gardien. Il entretient, repeint, quand il a le temps, les statues et reçoit avec le sourire les visiteurs (certains viennent de loin) intéressés par l'oeuvre de sa femme. Elle a toujours aimé bricoler, dit Julien, elle n'arrêtait pas. Son père était menuisier. Elle a commencé par sculpter le bois, plutôt bien à en juger par les chevaux et la vache conservés par Julien. Quand on est venu ici, à Cintegabelle en 1976, elle n'a pas trouvé le bois qui lui convenait. Elle a essayé de travailler le plâtre, mais il séchait trop vite, alors elle est passée au ciment. Avec des tiges de fer et du grillage elle créait une forme, qu'elle remplissait et modelait avec du ciment à mains nues. Elle ne supportait pas les gants, mais ses mains, elles, avec le temps n'ont plus supportées le ciment. Elle a dû arrêté sa création vers 2005, après avoir connu un petit moment de gloire grâce à une exposition à Toulouse qui réunissait quelques créateurs autodidactes de la région comme elle. Sous le titre "Les mains de jardin", on pouvait y voir entre autre, les créations de Joseph Donatello et de Joël Barthes. Quelques articles dans la presse locale, un dans la petite revue "Zon'art" et deux reportages à la télévision régionale, ont permis au travail d'Honorine d'être connu et reconnu par les amateurs d'arts autodidactes et d'environnements singuliers.
Cette foule étrange et bigarrée, devant sa maison, semble marcher résolument vers un avenir radieux sous l'oeil forcément bienveillant de la vierge et le regard quelque peu désabusé d'animaux exotiques ou familiers. La taille des humains chez Honorine est très variable, et ceci peut-être en fonction de leur importance à ses yeux. La vierge est nettement la plus grande suivit de près par Nicolas le jardinier. D'autres sont tout petits, une cinquantaine de centimètres environs, mais tous ont l'assurance de ceux qui savent où ils vont. Pour fermer ce cortège et tournant résolument le dos à tout le monde, on peut voir sur son perchoir le perroquet vert d'Honorine, copie conforme de celui qu'elle a longtemps porté sur son épaule.
Pendant 25 à 30 ans, Honorine a consacré tout son temps libre à son oeuvre. Le reste du temps elle s'occupait du jardin et des animaux de la ferme. Elle ne faisait jamais de dessin préparatoire. Quand elle avait une idée en tête, elle attaquait directement la forme et fallait pas trop l'embêter dans ces moments là, précise Julien. Si le résultat ne la satisfaisait pas, elle cassait tout et recommençait. Elle aimait aussi voir le travail des autres créateurs, elle s'est rendue plusieurs fois avec son mari chez René Escaffre à Roumens.
Elles ne sont pas très nombreuses les créatrices dans le domaine de l'art brut. Une dizaine pour cent, tout au plus, sont représentées dans la collection de l'art brut à Lausanne. Elles sont encore moins nombreuses dans le domaine des environnements spontanés et insolites et plus particulièrement dans celui de la création de statues en ciment. Elle sont même tellement peu nombreuses, qu'Honorine Burlin, à ma connaissance, est la seule a avoir oeuvré dans ce domaine particulier.
Une partie des oeuvres d'Honorine est conservée au Musée "Les Amoureux d'Angélique" à Carla Bayle dans l'Ariège, une autre partie est dispersée entre la famille et les amis. Ce que l'on peut voir actuellement devant sa maison, représente à peu près la moitié de sa production.
Merci à Julien pour son accueil.
Ce portrait a été traduit en anglais par Henk Van Es et est visible sur le site américain Spaces Archives à l'adresse suivante :
http://www.spacesarchives.org/explore/collection/environm...
A voir aussi l'article de Sophie Lepetit sur son blog : lesgrigrisdesophie.blogspot.com
Tournant le dos à tout le monde, une copie du perroquet qu'Honorine à portée sur son épaule
durant des années.
Photo "Hommage à Honorine Eté 2012"
Les premières sculptures sur bois d'Honorine. Les oreilles et les cornes sont en métal.
Maison et jardin en ciment avec figurines
Honorine a aussi réalisé et décoré les vases dans le jardin.
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05/09/2014
Collection Cérès Franco à Carcassonne ??
La collection Cérès Franco à Carcassonne ?
Le 28 septembre 2013, est inaugurée dans des salles réaménagées du musée des beaux-arts de Carcassonne, une exposition présentant une partie de la Collection Cérès Franco.
Cette exposition appelée "Acte 1-les Imagiers de l'imaginaire" est la première partie de la donation totale que fait Cérès Franco à la ville de Carcassonne, de l'ensemble de ses quelques 1500 oeuvres d'artistes du monde entier.
D'origine brésilienne, Cérès Franco ouvre à Paris au début des années 70 la galerie "L'Oeil de boeuf" où elle expose des artistes souvent autodidactes qui expriment avec force leurs émotions à travers un expressionnisme figuratif.
Elle exposera et collectionnera toute sa vie, des oeuvres proche de l'Art Brut, de l'Art Naïf, de l'Art Populaire, de la Nouvelle figuration, de l'Art Singulier, etc....
Installée à Lagrasse depuis une vingtaine d'années, Cérès Franco souhaite, à plus de 80 ans, voir l'oeuvre de sa vie installée et pérennisée dans un lieu officiel et adapté à sa démesure.
En 2011, Jean-Claude Pérez, Maire de Carcassonne et Alain Tarlier, Maire adjoint chargé de la culture, conscients de l'intérêt et de la valeur inestimable de cette collection, lui proposent de l'accueillir de manière permanente dans une aile du musée des beaux-arts.
En accord avec Cérès et sa fille Dominique Polad-Hardouin, galeriste et commissaire de l'exposition, il est décidé que la donation se fera en 3 actes. Trois expositions qui permettront d'installer progressivement les oeuvres au sein du musée.
Tout allait pour le mieux dans le petit monde des arts jusqu'au 30 mars au soir, où le résultat des élections municipales, avec la défaite du Maire sortant, a remis complètement le projet en question.
Début avril, aussitôt après son élection, M. Larrat, le nouveau Maire, annule le "Parcours d'art". Cette manifestation prévue pour l'été en parallèle du Festival, devait accueillir dans 8 lieux de la ville, la presque totalité de la collection. Les raisons invoquées sont d'ordre économique.
Le 25 juin, au cours d'un rendez-vous qu'elle a pris avec le Maire et son adjoint M. Bes, Dominique Polad-Hardouin apprend le refus de la donation par la nouvelle municipalité. Celle-ci préfère utiliser la nouvelle aile pour déployer les réserves du musée !
Pour un choc, c'est un choc. Trois ans de travail et de préparation sur ce projet quasiment abouti tombent à l'eau. Aucune proposition de conciliation n'est énoncée. Madame Cérès Franco n'a, à ce jour, reçu aucune confirmation écrite de cette décision. Fin août 2014, aucune annonce officielle n'a été faite, le site de la Mairie et la presse locale, visiblement pas informée, continuent d'annoncer l'accueil permanent de "l'audacieuse" Collection Cérès Franco au musée des beaux-arts de Carcassonne.
Il semble que dorénavant, au niveau municipal, c'est plutôt le manque d'audace et de courage qui fassent bon ménage.
Cérès Franco voit dans ce qu'elle appelle une volte-face quelque peu cavalière, une revanche "politicarde". C'est vrai que l'alternance dans ce domaine implique souvent que l'on défasse systématiquement ce que les prédécesseurs ont fait.
C'est fort regrettable, car cette collection est une des 4 ou 5 plus importantes d'Art Brut et Hors Normes en France. Très connue dans le monde entier, elle aurait sans aucun doute attirée chaque année de nombreux visiteurs. Faut-il que Cérès Franco, à l'instar de son célèbre prédécesseur Jean Dubuffet, expatrie sa collection en Suisse, ou au Brésil comme elle l'envisage à contre coeur ?
N'y-a-t-il pas une ville grande ou petite dans la région capable de recevoir dignement ce magnifique cadeau ?
Jean-Louis Bigou - article envoyé à la presse locale pour parution le 24 août 2014
La Collection Cérès Franco à Carcassonne
Les ex-votos brésiliens
L'Art Populaire mexicain
Sculptures et peintures de Jaber
Écrit par bigou dans Collection Cérès Franco à Carcassonne ?, VI A L'ART BRUT : EXPOS ET COLLECTIONS | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook
29/08/2014
Cérès Franco chez elle
Cérès Franco chez elle
J'ai rencontré Cérès Franco chez elle à Lagrasse le vendredi 15 août 2014. Quelque peu dépitée par la volte face municipale Carcassonnaise, elle ne continue pas moins de recevoir (sur rendez-vous), malgré son âge et ses difficultés à gravir les 3 étages de ses deux maisons respectives, les visiteurs intéressés par sa collection. En échange des 5 euros du droit d'entrée, elle peut évoquer durant des heures l'histoire de chaque tableau, la vie de chaque créateur, les angoisses et les tourments exprimés et projetés dans chaque oeuvre. Le tout en parlant d'elle, de son parcours, de ses rencontres et de ses combats. Dire que ses maisons sont de véritables cavernes d'Ali Baba est un doux euphémisme. Les murs sont couverts de trésors, les pièces, les couloirs et les escaliers regorgent d'oeuvres aux couleurs vives, puissantes et débordantes de vie. Les meubles quand il y en a, sont peints par des artistes et les sculptures envahissent le sol (Cérès n'aime pas les socles, trop conventionnel!). Chez Cérès l'Art c'est la vie et sa vie c'est l'Art. C'est de l'Humain qu'il est question chez elle et dans sa collection. De l'Humain et de l'Humanité à tous les étages comme l'eau et le gaz.
C'est vrai que dans cette accumulation d'oeuvres, on est aux antipodes de la rigueur muséale et de l'accrochage sobre et "contemporain" d'une petite partie de sa collection aux musée des beaux-arts de Carcassonne. Pourtant, elle aurait bien aimé qu'elle y reste sa collection au musée des beaux-arts comme c'était prévu de longue date. Au moins pour en assurer la pérennité et lui permettre, à elle, de se reposer un peu. C'était pratiquement chose faite. Le projet de donation de la totalité de sa collection à la ville de Carcassonne, grâce à Jean-Claude Pérez (ancien maire socialiste) et son adjoint Alain Tarlier, était largement engagé. L'exposition "Acte 1 Les Imagiers de l'imaginaire" de septembre 2013 à septembre 2014 en était la première étape. Mais grâce à Dieu et surtout aux électeurs de droite M. Larrat a été élu Maire de la ville. Aussitôt élu, aussitôt fait, d'un coup de balais purificateur il a bouté cet "art dégénéré" loin des murs de la Cité. Cette décision annoncée oralement à Dominique Polad-Hardouin n'est toujours pas 5 mois, après les élections, officialisée. 23 août 2014, la presse locale continue de parler de l'accueil permanent par la ville, de "l'audacieuse" Collection Cérès Franco. Trois jours après le 26 août, un article annonçait, enfin, le refus de la mairie, en précisant bien que cette décision n'était toujours pas officielle.
Le Maire souhaiterait, dit l'article, accueillir "des expositions de prestige en partenariat avec des musées nationaux". De l'art officiel quoi. Celui que tout le monde connait depuis longtemps ou celui à la mode, plus fugace, qui disparait aussi rapidement qu'il est apparu.
Bref, celui contre lequel Cérès Franco s'est battue toute sa vie.
Mais quittons ce "politic-art" environnement nauséabond , pour suivre Cérès dans la visite guidée de ses maisons.
Merci Madame Cérès Franco.
Écrit par bigou dans Collection Cérès Franco chez elle, VI A L'ART BRUT : EXPOS ET COLLECTIONS | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook